C’était un dimanche comme les autres.
La ville respirait le soleil et le début du printemps. L’air sentait le café et la poussière, les arbres commençaient tout juste à verdir, et les premiers couples étaient déjà assis sur les bancs, blottis l’un contre l’autre, comme si c’était la seule chose qui comptait.
Je suis arrivé en avance. Dix minutes plus tôt.
J’ai choisi une place sous un arbre, là où le soleil brillait doucement, sans éblouir, et où l’on pouvait entendre des musiciens de rue jouer quelque part à proximité.
Elle devait arriver à midi.
J’ai vérifié mon téléphone. Deux fois. Puis encore une fois.
Les minutes s’écoulaient étrangement, lentement, comme du sirop.
Tout autour de moi était vivant, bougeait, les enfants riaient, les vélos passaient, mais à l’intérieur de moi, c’était comme si tout était en pause.
Quinze minutes.
Pas de messages. Pas d’appels.
J’étais sur le point de me lever quand elle est arrivée.
Complètement différente.
Une fille avec un livre à la main, vêtue d’un manteau léger, une mèche de cheveux espiègle s’échappant de sa capuche.
« Excusez-moi, a-t-elle dit, puis-je m’asseoir ici ? Juste une minute.
J’ai acquiescé.
Elle s’est assise à côté de moi, a sorti un thermos et un livre.
Elle dégageait une odeur chaleureuse et familière, comme celle des oranges et de la vanille.
Nous sommes restés silencieux.
Puis elle a soudainement souri et m’a dit :
« Vous savez, c’est drôle, mais je m’assois toujours sur ce banc quand quelque chose ne se passe pas comme prévu.
J’ai ri.
Et j’ai soudain compris que je n’attendais plus personne.
Elle est restée plus d’une minute.
Nous avons discuté — de choses futiles, de livres, de la façon étrange dont les gens se rencontrent.
Quand le soleil a commencé à se coucher, je lui ai proposé un café. Elle a accepté.
Cinq ans ont passé depuis.
Je repense parfois à ce dimanche et je me dis qu’il aurait été si facile de partir, sans attendre, sans s’attarder, sans rester sur ce banc.
Et pourtant, tout a commencé par un retard.
Et par une simple question :
« Je peux m’asseoir ici ? »

